Les aventures d’Isadore sur l’Eastern Epic

Nous avons appris fin juillet que notre distributeur chinois organisait un événement parallèle à la célèbre compétition de VTT - Cape Epic. La course a lieu chaque année en Afrique du sud, mais plusieurs autres éditions ont été créées en Suisse, en Andorre et en Croatie, ainsi qu’une édition pilote en Chine. La course coorganisée par notre partenaire a eu lieu sur le plateau tibétain, à plus de 3500 m d’altitude.

Mots de Tomas Rosival, photos de Szymon Kotowski

Nous avons donné notre parole et constitué à la hâte trois équipes qui sont parties représenter Isadore en Extrême-Orient. Martin et Peter Velits ont pour cette occasion été rejoints par le coureur professionnel Adam Hansen, recordman de participation aux grands Tours, et par son partenaire d’entraînement Lukáš Štefek. La compétition se déroulant par équipes de deux, nous avons invité notre ambassadeur, Szymon Kotowski, connu sur Instagram en tant que szymonbike sur lequel nous pouvons compter, outre ses performances, pour capturer de jolis moments grâce à l’objectif de son appareil photo. J’étais son coéquipier.

Arrivée au pays des dragons

Nous avons décollé le 11 août de Budapest avec les frères Velits et notre équipe s’est retrouvée sans problème majeur à Chengdu, une vingtaine d’heures plus tard. Il s’est avéré rétrospectivement que ce transfert devait être le seul à s’effectuer en douceur au cours de notre voyage. Le jour suivant, nous avons pris part à notre première sortie avec un groupe d’une quarantaine de cyclistes locaux. Il nous a fallu un certain temps pour nous extraire de la ville de seize millions d’habitants, mais les gratte-ciel ont fini par s’effacer, au profit de maisons de paysans et de champs de maïs - la route était bordée d’habitants qui fumaient sur le bas-côté. Le soir venu, nous avons pu visiter la métropole et déguster des spécialités locales et épicées.

Le matin suivant, nous avons rejoint Aba, d’où partait la course. Le trajet devait durer environ 6 heures, mais M. Qian, qui conduisait notre minibus estimait qu’il en fallait plutôt 10. Une succession de tunnels routiers nous a peu à peu conduits dans les montagnes. Nous avons compris que nous approchions du but lorsqu’un paquet de chips a explosé à cause de la pression atmosphérique. Ma montre indiquait une altitude de 3200 mètres au-dessus du niveau de la mer. M. Qian a quitté la route principale et nous avons pu profiter d’un trajet à travers les zones rurales du Sichuan. Les chemins de terre défoncés se sont transformés en circuit de course et notre chauffeur n’a pas laissé le moindre centimètre d’espace à ses concurrents. Les voitures nous dépassaient sur la droite et sur la gauche, nous avons prié pour nos vies. La nuit est tombée et le minibus s’est arrêté dans un lieu qui ressemblait à un restaurant. La région n’accueillant que 150 touristes par an, notre présence a constitué une attraction. Nous avons ensuite pris des photos avec la propriétaire du lieu qui était très timide et sa fille qui l’était encore plus. Les habitants n’avaient encore jamais vu d’Européens en chair et en os.

Le premier jour à Aba s’est déroulé sous le signe de l’acclimatation et d’une balade relaxante dans les environs. Des montagnes ondulées d’un vert infini s’étendaient dans toutes les directions. Le paysage monotone était égayé par des yacks et des drapeaux de prière bouddhistes. L’air se raréfiant, nous avons dû rebrousser chemin après dix kilomètres pour récupérer. « Ces deux premiers jours nous ont administré une bonne dose de la province de Sichuan. Chengdu est une ville immense et dynamique, qui ne semble jamais dormir. À l’opposé, la sensation de calme dans les montagnes était formidable », se souvient Peter Velits.

Prologue

Le deuxième jour était celui du prologue. Le tracé était long d’environ 10 km et se déroulait sur une route goudronnée, ce qui est inhabituel pour du VTT. Szymon et moi nous sommes dit que nous allions donner le meilleur de nous-mêmes avant de passer les jours suivants à prendre des photos en profitant de l’ambiance. La course a été un calvaire. J’en ai eu assez dès le premier virage et chaque passage de relais entraînait une perte de vitesse moyenne de 5 km/h. Szymon m’a heureusement poussé jusqu’au sommet de la colline et nous n’avons pas fini comme le gars parti une minute avant nous qui a hérité de 11 points de suture au visage et deux dents cassées.

Martin a cassé sa chaîne en pumptrack et nos espoirs sont tombés à l’eau - Adam et Lukáš ont terminé quatrièmes. « Je suis le seul de l’équipe à ne pas avoir essayé le pumptrack la veille du prologue. Je pensais qu’y passer vers la fin ne serait qu’une formalité. J’étais déjà à la limite en prenant mon élan. Ajoutez à cela un mauvais réglage du transfert et mes prouesses techniques ont été plus que limitées. Cela ne pouvait être qu’un fiasco et j’ai passé la moitié du pumptrack à courir après mon vélo », ajoute Martin en souriant. On nous a servi de la viande de yak pour le dîner et le bilan de la journée a finalement été positif.

Première étape

On nous a informés dans la soirée qu’il allait falloir avancer notre réveil, prévu à 4h30, d’une heure en raison de fortes pluies. Nous avons rejoint les bus encore endormis, sans savoir où nous nous rendions et combien de temps durerait le trajet. Après une heure et demie, notre bus nous a déposés au milieu d’une colline. L’étape était à nouveau longue de 10 km. De la colline jusqu’à l’asphalte. « Grimper de la colline à l’asphalte 4000 m au-dessus du niveau de la mer a été un grand plaisir. J’ai surtout apprécié la balade en dehors de la compétition qui nous a permis de faire le tour d’un lac de montagne à 4200 m. C’était la première fois que j’essayais de rouler avec une bouteille d’oxygène, même si cela ne m’a pas beaucoup aidé. Chaque accélération était extrêmement difficile à cette altitude », ajoute Szymon, mon coéquipier. Je ne me rappelle pas grand-chose de la course. Une fois la ligne d’arrivée passée, les médecins ont mesuré notre taux d’oxygène dans le sang et nous ont proposé des bouteilles d’oxygène que j’ai fièrement refusées.

Deuxième étape

La météo s’est calmée et les organisateurs ont pu maintenir le parcours initial. La véritable compétition pouvait commencer ! Peter et Martin étaient repartis la veille pour l’Europe, car ils devaient prendre le départ de la course L’Étape à Bratislava. Il faudrait écrire un nouveau blog pour raconter leur voyage de retour. J’ai gravi une pente à 15 % sur le plateau tibétain tout en enviant l’odyssée de mes amis à travers les aéroports chinois. Pour une raison qui m’échappe, je pensais que la pente à gravir ne ferait que 400 m ce jour-là. J’ai compris que quelque chose ne tournait pas rond quand l’application Wahoo m’a indiqué une altitude gravie de 300 m au dixième kilomètre. J’ai commencé à m’effondrer progressivement dans la zone de départ. Mes souffrances ont pris fin au kilomètre 38, à 1000 m d’altitude. Je me suis promis d’étudier le tracé plus attentivement à l’avenir.

Troisième étape

Le dernier jour de compétition n’a pas été exempt de complications. Le départ a été repoussé en raison d’un épais brouillard et de la bruine qui tombait sur la colline. Szymon ayant attrapé un virus intestinal la veille, j’ai pris le départ sans mon coéquipier. Le tracé s’étendait dans un paysage magnifique. J’ai notamment apprécié la section autour du fleuve qui nous a permis de traverser un camp de nomades. La seconde partie avait lieu sur l’asphalte, les 60 km ont donc défilé très vite et j’ai pu atteindre la ligne d’arrivée de notre aventure.

Une météo maudite

Nous avons rapidement chargé nos affaires pour prendre la route de Hongyuan. Nous devions rouler 12 heures en bus avant d’emprunter un vol qui durerait une heure. Nos projets ont été une nouvelle fois contrariés par la pluie. Le vol a été annulé et nous avons dû chercher une alternative. Nous avons réussi à réserver un bus et avons pris une correspondance à 20h00 pour un nouveau trajet interminable à travers les routes chinoises. Nous étions convaincus que ce trajet nous serait fatal. Notre chauffeur conduisait exclusivement au milieu de la route et tombait régulièrement dans un micro-sommeil. De l’eau coulait dans le bus et la température était soit de 15, soit de 35 degrés. Je ne comprends toujours pas comment nous avons pu arriver à 3h du matin, sains et saufs, devant notre hôtel de Chengdu. J’avais prévu de consacrer mon dernier jour en Chine à quelques promenades touristiques classiques et à l’achat de souvenirs. Le déplacement de la ligne d’arrivée a cependant modifié mes projets et la fin du séjour s’est transformée en un combat pour survivre. Les autres personnes du groupe sont restées à Chengdu et ont pu visiter la plus grande attraction locale, une station de recherche où les visiteurs peuvent observer des pandas géants en voie de disparition dans leur milieu naturel. Pour ma part, j’ai rejoint l’aéroport dans la soirée. Le retour vers l’Europe a été marqué par de nouveaux soucis dus à la pluie, mais il s’agit du prix à payer lorsqu’on voyage durant les mois d’été.

Nous avons passé 11 jours intenses qui nous ont permis d’avoir un aperçu d’une culture inconnue en découvrant des saveurs complètement nouvelles. Nous avons vu de magnifiques paysages qui appellent à l’exploration, en VTT ou en vélo de route, tout en rencontrant beaucoup de personnes sympathiques. Pour nous, cette aventure a été vraiment « Epic ».